L'histoire du Hub Éthique
Le Hub Ethique, c’est d’abord, comme beaucoup de projets, l’histoire d’une rencontre et une aventure humaine.
Arnaud et Didier ont travaillé plusieurs années ensemble dans une entreprise de transport et de logistique. Ils ont piloté des projets d’organisation opérationnelle, d’évolution de systèmes d’information, de communication interne, de digitalisation des process… Ils ont aussi beaucoup échangé sur leurs valeurs, leur vision de la société et sur l’envie de participer, à leur niveau, au changement nécessaire pour un environnement plus durable et au développement d’une agriculture biologique locale.
Ils quittent leur entreprise et Arnaud lance l’idée d’un projet de transport et logistique de produits durables et locaux à destination des restaurateurs : permettre aux restaurateurs qui souhaitent développer leurs approvisionnements en produits locaux de qualité de se rapprocher des producteurs en proposant la mise en relation et la logistique. Les premiers contacts sont pris avec des acteurs de la bio (Manger Bio 35, Agrobio 35), des collectivités territoriales et des restaurateurs. Le projet des Toques Ethiques est lancé et la candidature d’Arnaud à l’incubateur de projets ESS Tag 35 est retenue.
De son côté, Didier a créé, avec un collectif il y a quelques années, une coopérative multi-activités à Caen (Ressourcerie, Epicerie de produits locaux et cantine) et il a constaté, dans la mise en place des produits proposés à l’épicerie, que la livraison est le frein principal au développement de nouveaux approvisionnements auprès des producteurs locaux : la plupart des producteurs livrent eux-mêmes leurs produits ou proposent que les bénévoles de la coopérative les récupèrent sur les marchés auxquels ils participent. L’absence d’une réelle organisation logistique freine considérablement les producteurs dans la diversification de leurs débouchés et dans l’acceptation de quantités plus faibles ou de fréquence de livraison plus importante.
La graine plantée, le projet peut commencer à germer. Porté conjointement par Arnaud et Didier, le Hub Éthique commence à pousser.
En août 2021, après de nombreux échanges, Arnaud et Didier décident de porter conjointement le projet qu’ils redéfinissent en septembre avec l’aide de Brut de Pomme, une jeune agence de communication qui partage leurs valeurs humaines et environnementales. Des séances de définition de projet et d’analyse stratégique sont organisées. L’offre est précisée : il s’agira de proposer à des producteurs/artisans transformateurs une solution logistique pour leurs livraisons locales : ramasse sur l’exploitation, mutualisation et dispactch sur une plateforme logistique, livraisons en magasins, restaurants, cantines,…
Et puis, il faut trouver le nom de ce projet, qui sera aussi le nom de la future entreprise… Après AGRITRANS, AGRILOG, ETAC, SLAC, CLAC, Locali, Le Fil vert et tant d’autres noms possibles !!! Le Hub Ethique s’impose à tous. Ce sont Benjamin et François, de Brut de Pomme, qui se chargent de proposer un logo, des couleurs, une charte graphique.
En septembre, le projet s’étoffe et un collectif s’organise autour des deux porteurs du projet : Pascal, Erwan et Jeff acceptent d’apporter leurs compétences au projet. Pascal a plusieurs dizaines d’années d’expérience dans la logistique et le transport, il maîtrise parfaitement les questions techniques relatives aux véhicules (il va approfondir le sujet des véhicules électriques) et a l’expérience de la maîtrise d’œuvre dans la construction de plateformes logistiques. Erwan est responsable d’une importante plateforme de produits bio en périphérie de Rennes. Il a une longue expérience dans la gestion des flux, l’organisation du stockage et connaît parfaitement le secteur dans lequel nous allons situer le projet : l’agriculture biologique. Jeff est responsable d’exploitation transport et gère plusieurs dizaines de véhicules et de conducteurs. Son expertise dans l’organisation des tournées, des contraintes réglementaires et plus généralement du secteur du transport est précieuse dans ce projet. Une association Loi 1901 est créée fin septembre 2021 pour préfigurer le projet et engager des demandes de financement pour l’ingénierie et l’accompagnement.
Faire de cette rencontre un projet commun et collectif, impliquant des acteurs & actrices engagés sur le territoire, voilà la volonté du Hub Éthique.
Le projet est hébergé chez TAG35. Arnaud suit le parcours d’incubation et d’accompagnement du projet. Il est à plein temps sur le projet et en parallèle suit une formation de 2 jours par semaine pendant 5 mois à Promotrans pour obtenir un certificat de l’École de Maîtrise des Transports lui permettant de respecter les conditions d’accès à la profession de transporteur routier. Didier y participe à mi-temps. Le dernier trimestre 2021 est consacré à la prise de contacts et au développement des partenariats : Manger Bio 35 et Agrobio 35 affirment rapidement leur volonté d’être des partenaires forts du projet. L’idée de proposer à des structures d’aide alimentaire de bénéficier de la logistique du Hub Ethique pour récupérer des excédents de production ou des invendus de produits locaux de qualités est soumise à Cœurs Résistants qui accepte également d’être partenaire du Hub Ethique sur ce volet de l’activité.
Les deux porteurs de projet consacrent également du temps à la rédaction de dossiers de demande d’aides financières : En octobre 2021, ils obtiennent une aide de 10 000€ du département d’Ille et Vilaine dans le cadre du dispositif Emergence ESS. En novembre, le projet est retenu dans le cadre de l’Appel à projet Alimentation locale et solidaire – France Relance. Une subvention de 72 000 € est accordée au projet tant sur des coûts d’accompagnement que d’investissements. Quelques mois plus tard, la Région Bretagne et France Active accorderont également une aide de 18 000 € au projet, ce qui permettra à l’association de salarier Arnaud à temps partiel.
Dès les premiers mois se pose aussi la question du local dans lequel sera développée l’activité. Ce sujet est complexe (et coûteux…) dans un secteur dans lequel la tension immobilière est très forte. Une recherche est lancée et, en parallèle, une possibilité d’hébergement chez un transporteur disposant d’espaces de stockage frigorifique est envisagée.
Plus qu'un défi, une raison d'être : trouver un modèle économique responsable et pérenne qui inclut l'ensemble des parties prenantes du projet.
En fin d’année 2021, un premier modèle économique est construit (très théorique !!), de nombreux partenaires ont affirmé leur intérêt pour le projet, et notamment des élus et des techniciens de collectivités territoriales comme Rennes Métropole, Val d’Ille Aubigné, Ville de Rennes, Région Bretagne, Département d’Ille et Vilaine, mais aussi des acteurs comme Reso Solidaire, France Active Bretagne, 21 kms puis quelque temps plus tard, Scarabée Biocoop.
Le début de l’année 2022 marque un tournant dans le projet : il faut maintenant valider auprès des producteurs l’offre qui a été imaginée et vérifier que le besoin existe réellement. Il faut donc réaliser une « étude de marché »… qui sera appelée Etude logistique. Avec l’appui d’Agrobio 35 et Manger Bio 35, les porteurs de projet contactent plus de 250 producteurs dans un rayon de 30 kms autour de Rennes. Ils organisent deux réunions publiques pour expliquer le projet et proposent aux producteurs/artisans transformateurs qui sont intéressés, de les rencontrer sur leur exploitation pour mener une analyse logistique plus approfondie avec eux. En parallèle est construit un outil d’analyse à 360° pour faire le tour de la problématique logistique-transport avec chaque producteur et avoir une analyse la plus précise possible pour proposer une solution adaptée.
Pendant plus de deux mois Arnaud et Didier vont donc sillonner la campagne rennaise et faire de magnifiques rencontres avec des producteurs investis dans leur métier et dans la défense de valeurs environnementales et écologiques. Même si certains freins à l’externalisation de la logistique sont exprimés (comme la perte du lien client, le souhait de maîtriser ses livraisons par des moyens internes ou le coût probable de ce type de prestation), une écrasante majorité des interlocuteurs interrogés se dit intéressée par le projet pour gagner du temps sur leur exploitation, accéder à de nouveaux marchés et limiter leur empreinte carbone par de la mutualisation et du transport en véhicules décarbonés. Ils seraient nombreux à privilégier une solution mixte de dépôt sur un entrepôt à proximité de chez eux pour les livraisons intra-urbaines et de maintien des livraisons en proximité avec leurs propres moyens. C’est ainsi qu’émerge l’idée de créer des points de dépôt relais autour de Rennes : des contacts sont pris avec des groupes de producteurs ayant des locaux partagés pour organiser la vente de paniers, ces locaux n’étant utilisé que quelques heures par semaine. Cette solution éviterait de louer plusieurs entrepôts autour de Rennes et permettrait d’organiser des rendez-vous de ramasse avec les producteurs.
Le second trimestre 2022 est consacré à l’analyse des résultats de l’étude logistique et à la mise en place d’un modèle logistique mixant des tournées pour Manger Bio 35 et des tournées préétablies pour les magasins de Rennes, avec ramasse des produits sur deux points de dépôt et sur un entrepôt. Le projet de site internet est lancé en avril 2022 avec l’arrivée de Maëlys, en stage au Hub Ethique pour trois mois dans le cadre de ses études en première année de Bachelor chef de projet digital à Digital Campus. Avec l’aide de Brut de Pomme, est conçu un site vitrine qui permettra aux producteurs mais aussi aux distributeurs de mieux connaître notre offre mais aussi les valeurs portées par l’entreprise.
Un local et des statuts : la concrétisation d' un ancrage local et solidaire
C’est dans cette période qu’une offre de location pour un local de stockage de 300 M2 situé à Pacé a retenu l’attention d’Arnaud qui s’empresse de contacter l’agence immobilière. Une visite avec le propriétaire et quelques échanges de mail plus tard, un bail est signé le 14 juin 2022 pour une entrée dans le local le 1er juillet. Les deux porteurs de projet peuvent alors déposer leurs statuts au Centre de formalité des entreprises : ce sera une SAS au capital de 18 500 € dont ils sont les deux premiers associés. Mais ils ont rédigé des statuts prévoyant une gouvernance ouverte aux salariés, clients, producteurs et partenaires et des dispositions statutaires permettant de faire agréer la société Entreprise Solidaire d’Utilité Sociale.
S’engage alors une phase opérationnelle : organiser l’aménagement du local (chambres froides, racks, bureau et sanitaires), choisir les moyens logistiques (véhicules électriques, matériel de manutention) et les outils informatiques (PC et logiciels métiers). En parallèle sont transmises des demandes de financement. Il reste aussi à concrétiser les engagements commerciaux avec les futurs clients de l’entreprise, recruter la future équipe salariée qui sera composée de chauffeurs-livreurs, gestionnaires de stocks/préparateurs et d’un exploitant transport-logistique. L’objectif d’un démarrage d’activité est fixé pour courant septembre 2022…